La stimulation cérébrale: message d'espoir

Publié le par GUENNEC

Un message d’espoir pour certains parkinsoniens



Publié le:  24 août 2006

Un Eudois (qui souhaite garder l’anonymat) a subi au mois de juin une importante opération neurochirurgicale qui lui a permis de faire disparaître une partie des symptômes de la maladie de Parkinson. Diagnostiquée il y a 15 ans, celle-ci avait évolué à tel point qu’elle lui “rendait la vie impossible”, aujourd’hui il témoigne pour vanter cette opération aux effets spectaculaires.

En 1817, le médecin britannique James Parkinson découvre la pathologie d’une maladie neurologique évolutive à laquelle il donne son nom. Les principaux symptômes de la maladie sont un tremblement au repos, une raideur ou une rigidité des muscles et une lenteur des mouvements (akinésie). “Il y a aussi l’anosmie, la perte de l’odorat partielle ou totale, un des principaux signes”, présente un parkinsonien eudois qui a souhaité témoigner sur son opération de neurostimulation. Il évoque également d’autres symptômes tels que la micrographie et le “freezing” (sentation de collage des pieds au sol). Les causes de ces désagréments se cachent au centre du cerveau, dans une partie appelée “la substance noire”, là où se trouvent les neurones dopaminergiques, des neurotransmetteur impliqués dans le contrôle des mouvements du corps. La dégénérescence de ces molécules, inexpliquée jusqu’alors, implique une évolution de la maladie. Les symptômes apparaissent souvent vers l’âge de 60 ans, même si 10 % des cas se révèlent avant la cinquantaine.

Il n’existe aujourd’hui aucun traitement curatif de la maladie mais il est néanmoins possible d’atténuer les symptômes du Parkinson par des traitements médicamenteux, plus particulièrement avec la L-Dopa, utilisée comme traitement de référence depuis sa découverte, en 1970. Malheureusement, si elle est efficace dans les premières années, la L-Dopa est en revanche suspectée d’être à l’origine de certains troubles moteurs chez certains sujets.

La neurostimulation

La technique de neurostimulation, mise en place par l’équipe grenobloise du professeur Alim-Louis Benabid, en 1993, apporte de ce fait une lueur d’espoir pour un certain nombre de malades atteints de Parkinson. Cette opération ne profite en réalité qu’à un petit nombre de malades, les critères de sélection des opérables par les neurologues étant particulièrement stricts. On estime entre 10 et 15%, le nombre de patients qui peuvent bénéficier de cette opération dite de stimulation cérébrale profonde, souvent les cas les plus sévères.

Une quinzaine d’hopitaux en France peuvent programmer cette opération. Le centre hospitalier de Rouen s’y est lui même lancé, en 2004, sous l’impulsion de quatre jeunes médecins, les neurochirurgiens, Bertrand Debono, formé auprès du professeur Benabid, et Olivier Langlois la neurologue-physiologiste Brigitte Chastan et le neurologue David Maltete. Accompagné de toute une équipe médicale et paramédicale, le quatuor a déjà opéré plus d’une quarantaine de patients qui doivent être dans un très bon état de santé général, tant l’opération qui consiste à poser deux électrodes dans la zone malade du cerveau (cette zone étant de la taille d’un grain de riz) est longue et stressante.

Pacemaker ou IRM

il faut choisir

Les patients, porteurs d’un pacemaker (stimulateur cardiaque) étaient jusque là exclus du processus de l’opération, leur appareillage leur fermant systématiquement la porte de l’IRM (Imagerie à Résonnance Magnétique) en raison des risques de chauffe de ses composants. Or celle-ci est absolument nécessaire pour établir les coordonnées de la topographie et de l’anatomie du cerveau opérable.

La volonté de fer d’un Eudois, atteint de la maladie depuis vingt ans, et porteur d’un pacemaker a poussé les médecins, neurologues et cardiologues à accepter de l’inscrire sur la liste des candidats, en dépit du risque dû à l’IRM. “Il a fallu que j’insiste auprès des médecins et du Dr Maltete auprès duquel j’ai rencontré beaucoup de compréhension. Le cardiologue du CHU de Rouen fut également d’un grand soutien pour m’autoriser à passer l’IRM en affirmant que je n’étais pas dépendant de mon pacemaker. Passer une IRM en étant porteur d’un pacemaker c’est une première. J’avais lu que les pacemaker et les défibrillateurs fabriqués après 2000 étaient compatibles avec l’imagerie à résonnance magnétique. Je voulais tenter le coup car les symptômes parkinsoniens me rendaient vraiment la vie impossible”, témoigne cet homme, qui assure qu’il a véritablement connu un avant et un après l’opération. Il précise néanmoins qu’il n’a pu transgresser l’interdit que grâce au soutien de son cardiologue, le Dr Jung, qui a assuré qu’il ne dépendait de l’appareil cardiaque qu’à hauteur de 6%.

Son témoignage se veut avant tout “le message d’un espoir de plus pour certains parkinsoniens. Il a fallu que j’insiste auprès des médecins pendant 15 mois mais cela valait la peine. Si d’autres malades souhaitent bénéficier de cette opération, il faut qu’ils insistent eux aussi. Suite à cette opération de neurostimulation certains parkinsoniens ont dit qu’ils connaissaient une seconde naissance. C’est vrai”.

I. Flutre

Une opération en deux phases

La stimulation cérébrale profonde n’est possible que grâce à l’association des technologies de pointe (imagerie médicale, recours à l’informatique avant et pendant les opérations...) et à une meilleure connaissance du cerveau.

L’opération mise en place par l’équipe du professeur Benabid consiste à descendre deux électrodes dans une zone du cerveau placée sous l’hypotalamus, zone qui n’est pas plus grande qu’un grain de riz.

Préparation

L’imagerie à résonnance magnétique (IRM) entre dans la préparation de l’opération, laquelle durera un peu moins d’une dizaine d’heures. Il s’agit alors de cartographier le cerveau afin de cibler la partie au coeur de l’opération, le striatum.

Un casque est posé sur la tête du patient. Il doit servir pour le repérage radiologique et électrophysiologique.

Action

Le neurochirurgien procède ensuite, sous anesthésie locale, à l’ouverture de la boîte crânienne. Il perce deux trous de 10mm de diamètre par lequel il va introduire les électrodes. Le microdescendeur, gradué au micron près et fixé sur le casque est chargé de cette opération extrêmement délicate.

Lorsque les électrodes sont placées dans le cerveau, le patient est sollicité par le neurochirurgien pour réagir aux premiers tests des électrodes, voir celles qui réagissent et comment elles réagissent.

Une deuxième opération est programmée le lendemain. Il s’agit alors de relier les électrodes à un électro-stimulateur qui est placé de manière sous cutané au niveau de la clavicule.

Des rendez-vous avec le neurologue sont programmés dans les trois à six mois qui suivent l’opération afin d’apporter les réglages nécessaires à l’électrostimulation.

“Je n’avais plus de projets”

A 50 ans, les premiers symptômes de la maladie de Parkinson sont décelés sur cet Eudois. “J’avais de légers tremblements au repos, j’ai donc suivi des tests qui ont révélés qu’il s’agissait de symptômes parkinsoniens”, témoigne-t-il.

Dans les quinze années qui vont suivre, d’autres symptômes vont faire leur apparition, dûs à l’altération progressive des neurones dopaminergiques: troubles du sommeil, mouvements lents, perte de l’odorat, miction fréquente, micrographie (écriture en patte de mouche). A tous ces désagréments s’en ajoute un autre. La maladie étant malheureusement méconnue, le regard extérieur sur le parkinsonien est souvent ressenti comme une gêne supplémentaire.

Vivre la maladie au quotidien n’est pas une partie de plaisir, ni pour le malade ni pour sa famille. Des conseils sur l’aménagement du cadre de vie sont suggérés afin de rendre la vie du malade plus aisée mais malgré tout “c’est invivable”, confie notre témoin. “Il faut vraiment le soutien d’une famille qui vous aime pour tenir le coup”, avoue-t-il avant d’évoquer quelques uns des handicaps (mal) vécus “je ne pouvais plus prendre ma voiture et donc plus sortir. Je n’avais plus aucun projet. Je ne prenais plus de rendez-vous qu’après la prise de mes médicaments, et encore on ne sait jamais quand ils vont faire effet”. L’intervention chirurgicale a redonné, plus que de l’espoir, une nouvelle vie au parkinsonien eudois. Pour lui, son entourage ou encore ses amis, la transformation est impressionnante. “Ma voix a changé, je peux reprendre le volant, je suis à nouveau autonome. Je ne suis pas encore guéri: il y a encore trois à six mois de traitements et de réglage des électrostimulateurs après l’opération mais je me sens nettement mieux. Je me sens revivre. Le but de l’opération n’est pas supprimer les médicaments mais de rendre la vie du patient plus agréable, plus vivable”, conclut le sexagénaire. Pari gagné.

On estime à 4 millions le nombre de personnes atteintes de la maladie de Parkinson dans le monde et autour de 100000 cas en France. L’intervention neuro-chirurgicale n’est cependant pas adaptée à chacun des cas, pour des raisons d’évolution de la maladie mais aussi d’âge des patients. Son coût enfin, de l’ordre de 7000 euros (évalué par l’assurance maladie) peut-être un frein supplémentaire même si celle-ci permet de diminuer le coût des soins (moyenne de 5800 euros avant l’opération, chiffres de l’assurance maladie ndlr).

Publié dans médecine

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